Outlast // Le DLC « Whistleblower » (PC)
Par Pierre Compignie le jeudi 9 septembre 2021, 12:18 - Archives
Sans doute l’une des extensions les moins décevantes que j’ai pu faire. Whistleblower propose de suivre le périple d’un autre personnage d’Outlast durant la crise de l’asile Mount Massive : Waylon Park, employé de Mount Massive et pas moins que le lanceur d’alerte du premier épisode, celui dont le courrier électronique lançait la quête du journaliste Miles Upshur, héros du jeu d’origine.
Les problèmes sont ici les mêmes. Le héros reste désespérément muet pendant tout le temps de l’aventure en vue à la première personne, choix incompréhensible tant il s’en prend plein la figure dans des cinématiques où l’on perd le contrôle pour se voir malmener, verbalement ou physiquement par un ou plusieurs personnages. Et pas un cri, pas un mot, rien. Juste quelques grognements étouffés.
J’avais fait le premier Outlast en mode normal (un sur quatre) et j’ai fait Whistleblower en mode cauchemar (trois sur quatre). Le jeu n’est pas beaucoup plus difficle en réalité. Ce qui change c’est le nombre de piles que l’on peut transporter (de sept on passe à deux, pourquoi ? des AA ne tiennent pas dans la poche ?), ce qui oblige à vraiment économiser la vision nocturne de sa caméra. Souvent je l’allume juste une seconde pour voir ce qu’il y a dans un coin et je l’éteins tout de suite après pour me déplacer au jugé ou en rasant les murs, car la caméra produit une lueur “gratuite” qui éclaire les murs auxquels on est collé. Le deuxième changement en difficulté cauchemar, c’est le nombre de coups qu’on peut prendre avant de mourir. Je ne me rappelle plus combien c’était dans Outlast, mais ici c’est un. On se fait taper une fois, et la suivante c’est la mort.
Ca ne change rien vraiment. Puisque que dans Outlast, quand on se fait taper c’est qu’on s’est fait rattrapé par un poursuivant, et cela arrive uniquement quand on n’a pas encore trouvé LE trajet. En cas de mort, on recommence quelques secondes avant, les points de sauvegarde étant nombreux et bien placés avant chaque occasion de se vautrer. Résultat, quand on a appris (par l’échec) par où passer, on se fiche bien de ne pas pouvoir se faire taper plus d’une fois puisque de toute façon on se ne se fera PAS taper. Je pense que le mode cauchemar joue aussi sur la capacité du personnage à s’auto-régénérer, plus lente ici. Dans tous les cas ce changement est le bienvenu, ça ne rend que plus dangereux des ennemis qui sont censés l’être, sans rendre le jeu plus injuste qu’il ne l’est déjà.
Les documents à ramasser présentent un contenu toujours aussi abscons. Ce n’est pas avec Whistleblower que le background anarchique d’Outlast gagne du sens. La soupe nazi / fantôme / fous / horreur / méchante entreprise n’est toujours qu’un lointain contexte dans un jeu qui s’apparente encore à une fois à une fuite en avant dans un asile, alternant les phases calmes et celles où on court pour échapper à un fou.
L’avantage de Whistleblower sur son aîné, c’est qu’il a soigné ses niveaux de poursuite pour que plus souvent qu’avant, on puisse s’en sortir du premier coup, “à l’instinct”, en observant le décor et en pouvant choisir gauche ou droite en voyant ce qui nous y attend, plutôt que se fourrer dans une impasse. Il y a toujours des moments bêtes où on doit mourir pour trouver le chemin mais c’est plus rare, alorsd qu’avant c’était la règle.
Le jeu est moins long qu’Outlast et c’est une bonne chose car cela l’empêche de trop se répéter. Au niveau de l’horreur et du malsain, les développeurs sont allés encore plus loin dans le putassier. Je veux bien qu’il y ait des fous dans un asile, mais à ce point. On croise un type de dos dont le mouvement du bras et les tirades suggèrent qu’il se branle devant un cadavre décapité. Un autre qui veut une épouse et donc changer en femme les hommes qu’il kidnappe, à coup de passages à la machine à bois… C’est souvent con et répugnant pour l’être. Il n’y a pas de recherche dans la personnalité de ces monstres, ce n’est pas non plus le sujet du jeu. Je me suis surpris que le jeu aille jusqu’à nous montrer attaché, nu et le sexe à l’air, avec une scie à bois entre les jambes qui avance pour nous castrer et sans doute faire une fente… Mais le jeu n’a pas non plus l’audace de faire exister le psychopathe responsable autrement que par le biais de scènes chocs faites juste pour ça, choquer. Pour montrer il y a du monde (et encore, les développeurs ne sachant pas modéliser un type se faire charcuter en détail, on voit la scène de loin et dans le dos du psychopathe, donc juste des gerbes de sang, des cris et deux persos qui s’agitent), pour être intelligent moins. Outlast c’est le train fantôme du gore et des psychopathes, on cherche à nous en mettre plein la vue sans souci de vraisemblance, de cohérence et d’approfondissement. Les développeurs sont peut-être gênés par leur propre sujet et ne s’autorisent donc pas à le traiter autrement que sous l’angle du bref sensationnel ?
Hormis tout cela, Whistleblower est à mon sens une version améliorée de Outlast, que je conseille de pratiquer en mode cauchemar. La fin est étonnamment positive ; elle aurait eu plus d’impact si on avait pu l’espérer. En effet tout le jeu crie au désespoir, au noir pour le noir et le premier épisode se terminait déjà bien mal. Là jusqu’au bout je m’attendais à voir un ultime rebondissement qui signerait le trépas de Waylon Park. Mais non. Et au lieu de me réjouir, je suis resté sur ce sentiment de surprise et d’incompréhension. Il aurait fallu plus préparer en amont la possibilité d’une issue heureuse, plutôt que perpétuer le sentiment que l’on est enfermé dans un snuff movie destiné à mal finir.
Avec son level design plus soigné et sa durée resserrée, Whistleblower rend Outlast un peu plus aimable et plaisant. D’autant que les animations de “parkour” sont toujours là quand on grimpe on qu’on enjambe un objet. J’ai d’ailleurs réussi à trouver tous les documents ! Juste en explorant consciencieusement les décors qui pouvaient l’être, soit pas les cours plongées dans l’obscurité ou le brouillard. Les fameuses “notes instantanées” du protagoniste sont toujours là et nécessitent toujours d’observer quelque chose avec la caméra levée, ce qui n’a pas vraiment de sens. Mais passé le côté incongru du procédé, avoir les impressions du héros régulièrement est clairement un bénéfice. Le mieux aurait été qu’à la place de ces notes à déclencher que l’on peut rater, le personnage tourne simplement la caméra vers son visage pour s’enregistrer parler.
Verdict = ok