Loch Ness (PC)
Par Pierre Compignie le samedi 2 juillet 2022, 13:00 - Critiques toute neuves
Développé par : GALILÉA MULTIMÉDIA (France)
Sorti à l'origine en : novembre 2001 (Europe, version PC)
Spectres, disparitions et manifestations surnaturelles : des phénomènes inquiétants se multiplient autour du manoir de Devil's Ridge, perché au-dessus du sombre Loch Ness.
À la demande d'un vieux physicien, propriétaire du manoir, le détective Cameron mène l'enquête dans l'Écosse des années 30.
Des recoins obscurs du château médiéval aux eaux troubles du Loch Ness en passant par le laboratoire secret du vieux scientifique, le détective se retrouve au cœur d'une conspiration bien réelle menaçant le monde occidental.
- Une intrigue rebondissant sans cesse qui mettra vos méninges et vos nerfs à rude épreuve.
- À vous de faire la différence entre phénomènes surnaturels et réalités scientifiques.
- Plongez dans l'ambiance de l'Écosse des années 30 grâce à des décors soigneusement modélisés.
- Une enquête à forte interactivité.[1]
Voilà j'ai terminé Loch Ness. Une aventure française en pointer-cliquer développée à Grenoble, en Isère, près d'où j'ai passé ma scolarité collège et lycée. J'ai été charmé par ce voyage en Écosse, les paysages, l'ambiance sonore (le vent), le manoir à la fois chaleureux (littéralement un havre de réconfort au milieu de la lande battue par le vent et la pluie[2]) et mystérieux, le ciel gris, le lac... Mais je n'ai pas du tout été convaincu par le reste de l'expérience : ni la progression interactive, ni la narration cinématographique, ni le design des personnages... C'était frustrant.
Niveau scénario, les cinématiques mettant en scène les dialogues et découvertes majeures sont à mon sens mauvaises, en ce que d'abord leur son est très mal mixé (les voix non sous-titrées sont couvertes par la musique bien trop forte) et ensuite en ce qu'elles ne mettent pas en valeur ce qui se passe dans la tête de Cameron, les liens qu'il tisse dans son cerveau, ce qu'il comprend. Résultat, je découvrais souvent après coup dans son carnet qu'il écrit hors-champ des informations dont je me demandais comment il les avait obtenues ! Et ce n'était pas seulement après des cinématiques ; parfois c'était la simple visualisation d'un document qui moi ne m'évoquait rien, qui faisait ensuite écrire à Cameron de nouvelles infos comme si elles étaient évidentes... Je me sentais donc souvent largué par l'enquête, comme si celle-ci se déroulait sans moi, sans que j'y prenne part ou que je comprenne les tenants et aboutissants. Très nul pour une histoire policère !
Et à côté de cela, la progression interactive m'a paru très lourde. Systématiquement je me demandais quoi faire, où aller. Je ne voyais rien avec quoi je pouvais interagir. C'est que Loch Ness a la très mauvaise manie de faire apparaître de nouveaux points d'interaction dans des endroits déjà visités, après tel ou tel événement (un changement de chapitre, une cinématique, ou même moins que ça). Cela implique rien moins que le public doit potentiellement ré-explorer tous les décors à la recherche d'une éventuelle nouvelle interaction qu'un script caché aurait débloqué en lousedé.
Perso, ce constat me désespère. Dans chaque salle je fais beaucoup d'efforts de concentration pour survoler avec le curseur tous les éléments qui me semblent potentiellement interactifs et repérer un éventuel changement de forme qui signalerait un point interactif. Je fais ce travail en me disant qu'au moins je serai fixé sur les différentes interactions possibles à cet endroit. Je ne fais pas ça, et je ne peux pas faire ça, en me disant que j'aurai à le refaire régulièrement quand je serai bloqué. C'est trop pénible. C'est chiant. Non !
Un autre système de Loch Ness qui m'a bien embrouillé, c'est le blocage rouge de curseur. Si Loch Ness reprend à son compte le même moteur que ses prédécesseurs Necronomicon et Louvre, il « innove » avec un nouveau symbole d'interface, le blocage rouge de curseur. Et alors j'ai galéré pour bien comprendre ce qu'il signifiait... D'abord j'ai cru qu'il voulait simplement dire « impossible actuellement d'interagir ici, mais peut-être plus tard, sous certaines conditions, ou si tu as le bon objet, alors OK on pourra négocier ». Je repense à des exemples comme les portes du manoir au début, qui se débloquent toutes seules plus tard (le blocage est levé par un script), ou encore la paroi de la chapelle (le blocage est levé, me semble-t-il, en trouvant une corde, qu'on peut utiliser sur la paroi). Je comprenais donc que dans le cas des points d'interaction où un objet est à utiliser, le blocage rouge est actif quand on n'a pas encore le bon objet à utiliser à cet endroit.
Et c'est ainsi que je me suis pris un coup de stress face à la porte de l'observatoire, parce que le curseur m'indiquait qu'une utilisation d'objet était possible, il n'y avait pas de blocage rouge, mais malgré cela aucun objet de mon inventaire ne fonctionnait pour l'ouvrir !
Je devenais dingue. Était-ce un bogue ? Je me suis résolu à vérifier sur UHS, peu enclin que j'étais à perdre mon temps à cause d'un bogue. Il s'avérait que non, ce n'était pas un bogue, qu'il y avait bien une clef à ramasser quelque part pour ouvrir la porte. OK, soit, donc j'avais mal compris ce que signifiait le blocage rouge de curseur ? Le blocage rouge ne serait alors jamais qu'arbitraire et pas du tout fonction du contenu de mon inventaire ?
Mais rien n'explique cela dans le manuel, et encore moins dans le vidéogiciel. On était à une époque où les développeurs n'avaient aucune pédagogie. Ils communiquaient extrêmement mal les choses et ne voyaient même pas qu'ils montaient des systèmes interactifs incohérents, illogiques ou ambigus[3].
Je n'ai donc pas énormément d'estime pour Loch Ness. Je suis arrivé à le terminer, mais c'était laborieux. J'ai souvent trouvé aussi que le déplacement « par case », un peu comme dans Louvre, était désorientant et peu intuitif, dans le sens où la distance parcourue change parfois de façon choquante entre les écrans, ou bien encore que le personnage ne se déplace pas toujours en ligne droite mais prend un angle sans que l'on pensait lui demander cela. La navigation dans le manoir est pénible à cause de ça, avec Cameron qui avance parfois bien plus loin que l'on voudrait et prend un virage alors qu'on voulait simplement faire deux pas en face de nous...
J'adore l'Écosse et je partage totalement l'attrait des développeurs grenoblois pour ce pays, dont ils ont réussi à transmettre une certaine ambiance, mais je ne peux passer outre la narration catastrophique et la progression interactive éreintante. J'attends mieux de mes VG (vidéogiciels pour les intimes).
Verdict = dispensable
Note(s)
- ^ Présentation officielle recopiée d'un scan de la quatrième de couverture.
- ^ Je note aussi le contraste entre le gris de l'exérieur et la couleur rouge éclatante dominante à l'intérieur du manoir. C'est donc aussi un réconfort « visuel ». Je n'ai pas visité de manoir en Écosse mais je ne serais pas surpris que ce soit un détail authentique.
- ^ Tout le contraire de CLOAK AND DAGGER GAMES qui t'expliquent l'interface au début de chaque aventure.
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