Saints Row : The Third | Remastered (PS5)
Par Pierre Compignie le jeudi 9 février 2023, 08:30 - Critiques toute neuves
Développé par : VOLITION (Illinois)
Sorti à l’origine en : novembre 2011 (Europe, version PS3)
Comment j’ai pratiqué : Terminé en 24h principalement en mode normal (2 sur 3), sur PS5 avec la manette Dual Sense Edge. 60 images par secondes. Version 1.005.
Saints Row : The Third Remastered vous permet d’incarner les Saints au sommet de leur puissance et de vivre chaque instant pour le montrer. C’est votre ville, vos règles. Remasterisée avec des graphismes améliorés, Steelport, la ville originelle du péché, n’a jamais paru aussi belle noyée dans le sexe, la drogue et les armes. Découvrez les scénarios de jeu les plus déjantés qui soient : balancez un char d’assaut dans les airs, ordonnez une frappe aérienne par satellite sur un gang de lutteurs mexicains et défendez-vous contre une brigade militaire tout entière.[1]
Mon expérience sur ce VG a très mal démarré. Je n’ai rien compris à la cinématique du début. Les membres du gang des Saints se déguisent en Saints avec de gros masques à l’effigie de leur membre le plus populaire, Johnny Gat, pour braquer une banque. Pourquoi ? Aux dernières nouvelles ils sont censés être des criminels alors pourquoi cacher leurs visages ?
Tout le monde parle Anglais, il n’y a pas de voix françaises, mais on a des sous-titres à suivre en pleine action alors qu’on tire de partout. Des sous-titres dont ni la longueur par apparition, ni la traduction, ne m’ont semblé pertinents. Ça m’horripile.
La mission introductive veut certainement en mettre plein la vue puisqu’on se retrouve en chute libre à devoir : flinguer des gus eux aussi en chute libre ; rattraper notre amie Shaundi ; la laisser temporairement (oui, oui) pour rentrer dans un avion ; le traverser, assassiner un mec dedans, en ressortir ; rattraper notre amie Shaundi à nouveau. Ça ne m’a pas amusé mais plutôt consterné. Je ne ressens aucun plaisir devant une séquence d’action qui défie toutes les lois de la physique. Ce qui survient est par définition arbitraire, je ne peux rien anticiper ni craindre puisque le scénariste se fiche de tout. C’est la négation du suspens. Aucun intérêt.
Ensuite on me débarque dans une ville ouverte générique visuellement. Je suis censé rejoindre des emplacements pour lancer des missions du scénario ou bien des activités annexes. Les déplacements en voiture ne présentent aucun enjeu : on n’a pas besoin de se répérer ou d’observer notre environnement par rapport à une carte puisqu’on a un GPS qui nous trace un itinéraire sur la mini-carte dans un coin intérieur de l’écran, et qu’on a même des flèches qui apparaissent sur la route (façon réalité augmentée) pour nous dire quand il faut tourner. On n’a pas besoin d’éviter les accidents puisque notre personnage est quasiment incassable, que notre voiture aussi et que si jamais elle nous lâche on en vole une autre à n’importe qui en une pression de bouton. On ne craint pas non plus d’écraser des piétons puisque la police réagit à peine et que de toute façon, si elle nous recherche, il suffit d’entrer dans une boutique que l’on possède pour qu’elle nous oublie tout à fait. Et évidemment, notre personnage est psychologiquement un roc, aucunement affecté par les agressions infligées ou reçues. Non, en effet, il n’y a strictement aucun enjeu dans les multiples déplacements requis pour rejoindre un point d’intérêt. C’est une tâche 100% triviale, qui demande seulement du temps, et qui me tape rapidement sur le système dans toutes les productions de ce genre (Assassin’s Creed III m’a fait beaucoup courir bêtement lui aussi) – les vidéogiciels dits « à monde ouvert » qui isolent le récit dans des « missions » qu’il faut « lancer » en se rendant quelque part. Heureusement Death Stranding a fichu un bon coup de pied dans cette fourmilière en faisant des déplacements le cœur de son challenge… Je m’égare.
Plein de bonne volonté j’avais lu avant d’attaquer des astuces à connaître pour avoir la meilleure expérience possible. L’une d’elle me conseillait de faire toutes les activités annexes de type « assassinat » le plus tôt possible car il existe un risque, en avançant dans le scénario, de se bloquer certains assassinats. Donc bon, j’ai écouté les conseils et j’ai enchaîné les assassinats. Mauvaise idée : cette activité est très ennuyeuse car, comme les déplacements, c’est du travail ingrat, qui ne demande aucune compétence, juste du temps : se rendre au point indiqué (souvent à l’autre bout de la ville évidemment) et accomplir une action assez évidence pour que notre cible apparaîsse avec un gros point blanc bien visible au-dessus de la tête… J’en ai fait 10 et j’étais dégoûté. Plus jamais ça ! On n’a qu’une vie vous savez. Pourquoi remplir le VG d’activités aussi nulles ? Je ne comprends pas les développeurs.
J’ai donc repris le récit (les missions scénarisées) et globalement j’ai trouvé cela assez nul. C’est un gros délire, de l’action à prendre au millième degré ; le royaume de l’inconséquence. Le héros subit une chirurgie esthétique intégrale pour une mission afin de se faire passer pour un autre, ce qui est dingue en soit mais tout le monde s’en fout, et quand on termine la mission il retrouve son apparence initiale. On fait péter au lance-roquette des dizaines et des dizaines de véhicules, l’argent et les ressources naturelles semblent être disponibles à l’infini. Bien sûr il n’y a pas d’enjeu dramatique ; il s’agit juste de devenir les rois de la ville et de vaincre quiconque se met sur notre route, dans une ambiance à la fois violente et potache. C’est très particulier mais ça ne m’a pas beaucoup amusé.
Ceci étant, j’ai de plus en plus accroché à l’expérience. D’abord au sujet des sous-titres, j’ai décidé de les désactiver et de mettre le casque pour bien distinguer les voix anglaises. Je ne comprenais pas tout à 100%, j’ai dû me battre avec les options sonores pour qu’elles ne soient pas recouvertes par les effets ou la musique, mais au final ça est allé plutôt bien de cette façon. J’ai trouvé attachant le personnage de Kinzie, une geekette asociale qui s’assoit sous la table lorsqu’elle est dans un café, et qui nous dit lors d’une mission pleine d’action qu’après ça elle « se cloîtrera chez elle pendant des semaines » (comme je la comprends). La dernière mission, au cours de laquelle j’ai choisi d’aller sauver Shaundi plutôt que de traquer Killbane, était riche en émotions car portée par une chanson puissante de Bonnie Tyler, Holding Out For A Hero.
L’humour a marché sur moi à l’occasion du match de catch qui se transforme soudainement en boucherie quand notre héros récupère une tronçonneuse ; les commentateurs sont à peine choqués et s’enthousiasment comme des enfants, totalement déconnectés de l’horreur du massacre. J’ai aimé aussi l’activité annexe du Professeur Genki ; c’est une sorte de jeu télévisé dans lequel on cherche la sortie d’un labyrinthe tout en se battant à mort contre des types déguisés en mascottes. Le délire va assez loin car le jeu est commenté par deux présentateurs dont les échanges m’ont souvent fait sourire ; il y a des panneaux sur lesquels tirer, avec une notion de cible « éthique » et « pas éthique », en l’occurrence il n’est pas éthique de tirer sur un panda (je ris rien qu’en l’écrivant) ; c’est chronométré, donc il faut aller vite, bien viser et gérer correctement la fin du niveau car des grosses brutes arrivent à l’infini. Je pense que c’est dans cette activité que le VG brille le plus dans son challenge interactif.
À propos des fusillades, qui sont extrêmement nombreuses… D’un côté je les trouve bien trop bourrines pour être intéressantes. De l’autre, j’ai souvent été agréablement surpris par l’animation des ennemis sous les impacts de balle et les effets sanglants. C’est mine de rien assez bien fichu, le spectacle des affrontements armés est visuellement pêchu. C’est dommage que l’action soit si exagérée, rapide, avec des explosions dans tous les sens, des ennemis par centaines, des armes automatiques hyper précises, sans dispersion, car la justesse de certains détails est alors noyée dans la frénésie. Quelque part je me dis que les gens qui ont travaillé sur ces fusillades ne seraient pas incapables de nous pondre un VG lorgnant sur la simulation hyper immersive de Killzone 2, si on leur donnait le bon projet et les moyens de le faire. Même les vibrations de la manette lorsqu’on tire sont satisfaisantes.
Enfin, last but not least, j’ai découvert sur le tard des chansons super sur la radio 89GENX, notamment Lost Desire de l’artiste Jr. Des chansons qui m’ont tellement plu que j’ai pris plaisir à me balader en ville en voiture, avec comme acolytes les trois persos féminins principaux de l’histoire, et après avoir changé mon apparence pour adopter celle d’une jolie femme[2] avec un look des années 60. Avec ce petit gang on roulait avec la radio à fond et on allait tirer sur des membres de gangs adverses. Très cool, gros sentiment de liberté enivrant avec la musique.
Ah oui j’ai aussi un point de comparaison avec Saints Row 2. Le scénario était plus tenu, mais je veux surtout parler du récap’ de nos actions que l’on avait à chaque fin de mission, quand l’écran affichait la une d’un journal narrant nos « exploits ». Ça m’avait parfois fait mourir de rire car l’absurdité des histoires de gang se mariait très, très bien avec le regard objectif des unes du journal local. Dans Saints Row : The Third ces unes sont remplacées par un flash info à la radio, par la présentatrice Jane Valderama. J’ai beaucoup moins ri qu’avec les unes de SR2.
Concernant cette version remasterisée sur PS5, le bon côté est que c’est très joli et que ça tourne à 60 images par seconde de façon fluide. Le mauvais côté est que certains dialogues plantent le logiciel de façon systématique lors de missions principales… Il faut alors se montrer créatif pour empêcher les héros de le déclamer. Dans un cas j’ai dû faire un trajet à pied (au lieu de monter en voiture). Dans un autre, j’ai accédé au menu « Habitation » pour couper le dialogue. Cette version contient tous les DLC sortis et ce dès le début de l’aventure, ce qui casse un peu tout car on a directement accès à un tank surpuissant et plus généralement des tenues et véhicules par dizaines que l’on est normalement censé acquérir petit à petit avec l’argent gagné. Personnellement je me suis senti un peu « enseveli » sous les items, et de ce point de vue j’aurais préféré pratiquer une version vierge de DLC. A contrario, le fait de disposer d’un balai de sorcière m’a permis de gagner rapidement les points d’intérêt de la ville sans avoir à gérer la frustration induite par les déplacements en voiture perte de temps. Parmi les DLC il y a aussi trois packs de missions, l’un autour d’un fanboy puéril qui parvient à cloner Johnny Gat en une sorte de monstre[3], un autre avec de nouvelles missions du Professeur Genki et un dernier que je n’ai pas pratiqué qui s’appelle « gangsters dans l’espace ». J’ai trouvé les deux premiers packs anecdotiques. Même celui du Prof Genki n’est pas génial car les deux nouvelles arènes sont plongées dans la pénombre et peu lisibles, je voulais les terminer aussi vite que possible et j’ai pu le faire, preuve que leur conception ne renouvelait en rien le principe. Il y a par contre deux missions assez marrantes où l’on vole dans un costume de panda et où l’on doit passer dans des anneaux de feu dans le ciel de la ville, mais aussi s’arrêter sur des toits d’immeubles pour tronçonner des mascottes. Les commentaires des présentateurs sont drôles et le mode de déplacement original, mais la difficulté pas bien élevée échoue malheureusement à nous impliquer en profondeur dans la propositon – aussitôt essayée aussitôt bouclée.
J'ai commencé par détester Saints Row : The Third et pensé sérieusement à l'abandonner. Et puis, sur le tard, quelques aspects de sa proposition foisonnante m'ont attaché à lui : des fusillades un brin immersives dans les animations, de super chansons de rock sur la radio, une chouette mission finale, un personnage féminin de nerd attachante, de l'humour faisant enfin mouche dans les commentaires de combat télévisé en arène. Mes dernières heures furent très plaisantes en me baladant dans la ville à toute berzingue avec la stéréo à fond, libéré que j'étais des faux enjeux d'un scénario handicapé par sa propre surenchère.
Verdict = ok
Note(s)
- ^ Présentation du Playstation Store.
- ^ Un trophée nous invite à passer deux heures en tant qu’homme ET en tant que femme.
- ^ Une mission de ce pack présente une difficulté telle que j’ai eu besoin de basculer en mode facile. On est dans une voiture, un ami conduit et on doit juste tirer des missiles sur les camions de police qui nous agressent. Mais alors, impossible de survivre jusqu’au bout en mode normal… Je pense que les développeurs ne sont vraiment pas pris la tête sur le réglage du challenge de ce DLC.
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