The Mark of Kri (PS2)
Par Pierre Compignie le samedi 28 octobre 2023, 19:00 - Critiques toute neuves
Développé par : SONY SAN DIEGO STUDIO (Californie)
Sorti à l'origine en : juillet 2002 (États-Unis, version PS2)
Comment j'ai pratiqué : Terminé en au moins 7h41 (probablement plus) avec la manette Dual Shock 2. 50 images par secondes. Textes et voix en Français, la plupart non sous-titrées. J'ai trouvé les six statuettes cachées et j'ai complété tous les défis des six chapitres.
Bidouilles diverses : Aucune, j'ai pratiqué sur une PS2 originale avec le disque original.
Il y a bien longtemps, le plus redoutable des sorts maléfiques, le sceau de Kri, fut brisé en six fragments que l'on éparpilla à divers endroits du monde pour éviter qu'ils ne tombent entre de mauvaises mains.
Mais les serviteurs des ténèbres, devenus puissants, recherchent les fragments perdus. Seul Rau le guerrier, notre héros, et Kuzo le corbeau, son fidèle guide spirituel, peuvent les empêcher de libérer d'épouvantables forces du mal...
- Une aventure mêlant furtivité, stratégie et combats acharnés
- Tout un arsenal d'armes, de combos et de coups de grâce violents
- Maîtrisez l'art des attaques multiples à l'aide d'un système de visée unique
- Observez l'action à travers les yeux de Kuzo et utilisez-le comme éclaireur, pour distraire l'adversaire et récupérer des objets[1]
TMOK est une création d'un studio interne à Sony, le studio de San Diego, c'est d'ailleurs leur premier VG. De loin, on se dit que l'on va avoir affaire à un vidéogiciel de bourrin, avec ce gros guerrier maori mutique qualifié par le narrateur même de « barbare ». Et en fait, pas vraiment, voire pas du tout. TMOK est constitué de six chapitres, eux-mêmes divisés en deux à trois longues zones qu'il s'agit de traverser d'un point A à un point B. Sur notre route, des ennemis évidemment... Mais là où TMOK est original, c'est qu'il ne fait pas du combat une fin en soit, mais au contraire un danger à éviter.
Car en combat il n'y a pas de solution miracle... Les attaques ennemies sont trop rapides et trop aléatoires pour pouvoir être anticipées. On dispose de cinq combos plus ou moins spectaculaires mais les ennemis parent tout le temps ! On passe son temps à taper des types en position de garde. Alors oui on finit par les tuer, avec de la patience, en parant soi-même pas mal... Mais on perd de la vie, on n'est pas efficace, on est constamment en situation d'échec. On est content quand on arrive à placer un combo en entier et à battre un ennemi avec le mouvement final brutal et spectaculaire des meilleurs combos. On est content quand lequel des cinq combos en particulier fonctionne bien sur un type d'ennemi donné. Mais voilà, les combats sont durs ; ce n'est pas une science exacte ; on galère, on perd de la vie, on est rarement efficace ; en un mot, on a tout intérêt à ne pas se battre !
Et en fait, le level design de TMOK est justement tout entier consacré à nous donner dans 80% des rencontres, une solution tactique, furtive, qui permet de tuer tout le monde sans être repéré, soit à mains nues, soit avec un arc.
Les possibilités sont nombreuses car on peut distraire les adversaires grâce à un animal qui passe par là, grâce à un objet du décor qui fait du bruit ; on peut étudier les rondes des gardes pour surgir pile au bon moment afin de tuer rapidement, silencieusement et sans être vu, au coin d'un mur, depuis le sommet d'une corniche, un ou deux ennemis à la fois... Certains adversaires portent une armure et ne craignent pas les flèches, il faut donc forcément aller au contact, ou bien les éviter.
Mais tout ceci serait très compliqué si l'on était prisonnier du point de vue du personnage ; comment étudier les rondes des ennemis, les possibilités tactiques de l'environnement, en craignant à chaque pas d'être repéré ? C'est là qu'intervient Kuzo, le corbeau « guide spirituel » du héros Rau, dont on peut partager la vision, et bien sûr l'envoyer au devant du chemin pour se faire une idée des dangers qui nous attendent, et des éventuelles possibilités pour les neutraliser ! Il en résulte un challenge qui m'est apparu étonnamment juste, qui ne m'a jamais fait me sentir pris au dépourvu, ou plus précisément, qui ne m'a jamais donné le sentiment de devoir mourir pour trouver la solution.
À ce titre, TMOK se permet un système de sauvegarde exigeant : il n'y a aucun point de passage et, si on peut sauvegarder n'importe comment, il faut ramasser un parchemin pour pouvoir le faire. Alors okay, les parchemins sont en nombre amplement suffisant pour sauvegarder régulièrement, mais quand même, la tension est là, on ne peut pas recommencer automatiquement toutes les trente secondes de progression, on doit chercher à survivre sur la longueur et, heureusement, le VG nous donne toutes les clefs pour y parvenir.
Esthétiquement et scénaristiquement, j'ai trouvé TMOK efficace, sans relever du génie. On est bien mis dans l'ambiance tribale, ça ne vole pas très haut, ce n'est pas énormissime, mais c'est suffisant pour y croire, et l'histoire ne traîne pas, les six chapitres correspondent chacun à un enjeu particulier pour le héros, dans le récit qui nous est conté. La brutalité des attaques de Rau (qui arrive quand même parfois à faire de gros dégâts), le côté sauvage/sanglant allié à un rendu graphique à la Disney, marchent vraiment pas mal. Je pense qu'ils auraient pu pousser le gore encore un peu plus loin.
Et alors aussi, le maniement de Rau est top, il est lourd, ses animations en font une grosse barrique qui ne manque pas de faire vibrer la manette à chaque fois que son centre de gravité se déplace (lors d'une chute, en se hissant sur un rebord, en escaladant une échelle et même en mourant, avec deux étapes – le tombé à genoux puis l'affalement par terre). J'adore. On ne peut pas non plus le faire se retourner comme on veut. Quand on pointe le stick gauche dans une direction, Rau se tourne d'abord vers elle avant de se mettre à courir. Il y a eu clairement un gros boulot pour que l'on prenne conscience du corps massif de Rau pendant qu'on le contrôle. On nous met bien dans sa peau !
Six chapitres, ce n'est pas long, mais chacun d'entre eux prend facilement une heure au moins, et j'étais content quand j'arrivais au bout ! Ce qui est fort c'est que les développeurs ont vraiment réussi à varier l'action au sein de ces six chapitres. La progression est une succession « d'ateliers » où Rau est confronté à une configuration ennemie chaque fois sensiblement différente. On doit en permance observer son environnement, réfléchir, élaborer une stratégie. On sait aussi que dans chaque chapitre, une statuette optionnelle est à trouver, dans un chemin secret, donc j'étais en permanence à l'affût d'un embranchement. Nos possibilités armées évoluent aussi, à chaque chapitre quasiment correspond une nouvelle arme, efficace contre les nouveaux types d'ennemis rencontrés.
Il y a aussi les « défis de Baumusu », une liste de défis dans chaque chapitre, censée avoir été donnée à Rau par son père Baumusu. Dans les faits, on a cette liste même quand Rau et son père se font la gueule, voire que le père est décédé... Donc s'il y a bien une volonté de contextualisation de cet objectif annexe, elle n'a pas été poussée au bout. Je suis mitigé quant à ces défis. Certains nous poussent à découvrir les combos des nouvelles armes, c'est facile et sympa. D'autres nous poussent à découvrir le plus de stratégies furtives possibles, c'est chouette aussi. Mais certains sont peu clairs (mauvaise formulation des défis au chapitre 4) et d'autres évoquent le pire des trophées/succès qui seront de mise à partir de la PS3 (décapiter 60 ennemis avec la hache). Donc oui ça met de la difficulté supplémentaire et un challenge bienvenu, mais la raison d'être diégétique de cette « liste de courses » n'est pas convaincante, tandis que certains items sont plus pénibles qu'autre chose.
Pour une fois je rejoins l'avis de la presse de l'époque : j'ai bien accroché à Mark of Kri, c'est une quête guerrière très efficace. Paradoxalement, même si on incarne ce qui semble être un gros bourrin, les combats sont à éviter car impossibles à maîtriser vraiment... Il s'agit alors de ruser, d'exploiter son environnement, d'être furtif. Les développeurs ont conçu six chapitres aux épreuves sans cesse renouvelées, sans gras. Kuzo l'oiseau, dont on partage le point de vue, assure que le challenge soit juste en nous offrant une vision panoramique des niveaux qu'on l'envoie explorer en éclaireur. Ce n'est pas très profond humainement parlant mais l'action est captivante.
Verdict =dispensable|ok| vaut le coup ! |énormissime
Note(s)
- ^ Présentation recopiée de la quatrième de couverture.
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Commentaires
Joli travail !
Du mal à comprendre « diégétique « mais je pense que tu sauras mieux me l’expliquer que Google !
Merci ! Quelque chose de diégétique c'est quelque chose qui fait partie de l'univers de l'œuvre. L'interface du VG peut t'ordonner d'aller ramasser 30 pastèques mais est-ce que cet ordre existe au sein de l'univers ? A-t-il été prononcé par un personnage ? Résulte-t-il d'une volonté interne au héros ? En l'occurrence, les défis que je mentionne (qui sont visibles dans le menu pause) sont écrits comme provenant du personnage secondaire Baumusu, mais ils continuent d'être alimentés même quand Rau (le héros) et Baumusu se font la tête... Donc en fait ce sont des défis qui n'ont pas grand chose de diégétique, ce sont les développeurs qui s'adressent directement au public.